PEFOP : retour sur sept années de transformation de l’EFTP en Afrique

Depuis 2015, la Plateforme d’expertise en formation professionnelle (PEFOP) œuvre pour l’emploi des jeunes en Afrique. Par cette initiative d’ampleur, l’IIPE-UNESCO Dakar a contribué, avec ses partenaires, à renforcer et rénover les systèmes d’enseignement et de formation techniques et professionnels (EFTP) du continent. Développement de partenariats public-privé, mise en place de la validation des acquis de l’expérience,  mutualisation de ressources entre pays africains, production de connaissances, formation de cadres supérieurs au Pilotage et à la gestion de l’EFTP… découvrez les principaux résultats la PEFOP, chiffres et témoignages à l’appui.

Image
© IIEP-UNESCO DAKAR/Sylvain Cherkaoui
Image
© IIEP-UNESCO DAKAR/Sylvain Cherkaoui

En Afrique, une personne sur deux a moins de 25 ans et la croissance démographique est la plus rapide au monde. L'employabilité est donc un enjeu majeur pour l’avenir du continent. C’est sur la base de ces constats que l’histoire de la PEFOP a débuté en 2015, sous l’impulsion de l’Agence française de développement (AFD). 

Au départ, l’IIPE-UNESCO Dakar a été mandaté pour mettre en œuvre une feuille de route ciblée sur quelques pays d’Afrique francophone. L’objectif était de mobiliser et d’outiller non pas seulement les ministères en charge de l’EFTP, mais plus largement l’écosystème d’acteurs de la formation technique et professionnelle impliqués sur le terrain : entreprises, acteurs publics et privés, syndicats, etc. Avec deux grandes convictions : l’offre de formation doit être pilotée en fonction des besoins économiques réels -  et l’insertion professionnelle doit être placée au cœur de tous les processus de l’EFTP pour favoriser la transition entre formation et emploi.

Trois grands volets

Entre 2015 et 2022, la PEFOP est donc intervenu, aux côtés de ses partenaires, sur trois types de chantiers en parallèle : 

  1. Des appuis techniques aux pays, visant à accompagner et accélérer la mise en œuvre de politiques « rénovées » en matière d’EFTP. 
  2. Des activités de mise en réseau, de production de connaissances et de partage d’expériences à l’échelle du continent, entre les acteurs du secteur de l’EFTP. 
  3. Un soutien à l’innovation en EFTP, pour encourager les expérimentations et capitaliser sur les expériences. 
35
pays africains ont été impliqués dans les activités PEFOP entre 2015 et 2022

L’année 2018 a marqué un tournant pour la PEFOP, qui s’est ouverte à de nouvelles activités et a développé de nouveaux partenariats d’action. Cette deuxième phase du projet se caractérise notamment par le développement de la nouvelle formation « PGEFTP » destinée aux cadres africains en charge du pilotage et de la gestion de l’EFPT, ainsi que de nouvelles activités et interventions dans les pays africains, au-delà du périmètre initial.

Timeline Pefop

 

Appui technique: mettre tous les acteurs clés autour de la table

De nombreux pays africains ont engagé des réformes de leurs systèmes de formation professionnelle ces quinze dernières années. Toutefois, leur mise en place opérationnelle s’est souvent avérée complexe, et a parfois tardé à produire les effets escomptés. Analyser la situation au niveau national et local pour identifier les points de blocage a toujours été la première étape privilégiée par la PEFOP. Ainsi, au Burkina Faso, en Mauritanie ou au Sénégal, la démarche d’appui technique a été initiée par un diagnostic des freins à l’opérationnalisation des réformes de la formation professionnelle.

7
cadres de partenariats impulsés par la PEFOP dans les pays partenaires, dont trois déjà opérationnels.

Chaque analyse a ensuite débouché sur un ensemble de plans d’actions, dont certains spécifiques aux secteurs d’activité ou aux contextes régionaux propres à chaque pays. (Les Plans d’action sectoriels territorialisés). Plus globalement, la PEFOP a cherché à encourager les partenariats public-privé dans le domaine de l’EFTP, et à faire bouger les lignes sur des questions aussi diverses que l’approche par compétences, la validation des acquis de l’expérience ou la formation des formateurs. Au total, une douzaine de missions d’appui technique ont été menées dans neuf pays du continent tout au long du projet. 

La collaboration avec la PEFOP en Mauritanie a permis de développer des activités innovatrices (…) en particulier des cadres régionaux de partenariat, qui regroupent tous les acteurs de la formation, les employeurs, les entreprises, les syndicats. Ces partenariats permettent notamment de développer des projets de formation qui découlent de l’identification des besoins réels en formation, au niveau régional.

Ahmédou Mané
Chef du département Ingénierie Pédagogique de l’Institut national de la promotion de la formation technique et professionnelle de Mauritanie

Partage, réseau et connaissances : fédérer et créer des synergies entre acteurs africains de l’EFTP

 

Atelier Pefop

Ces sept dernières années, la PEFOP a coorganisé plus d’une dizaine d’événements internationaux et d’ateliers régionaux visant à rassembler et fédérer une communauté d’acteurs africains des systèmes d’EFTP. Sans compter les nombreux webinaires, conférences et ateliers qui se sont tenus en ligne, en raison de la situation sanitaire. Ainsi, de Dakar à Nairobi, Lomé ou Cotonou, les questions de la qualité des systèmes d’EFTP, des modes alternatifs de financement du sous-secteur ou des partenariats public-privé ont fait l’objet d’échanges et de partages d’expériences entre les pays francophones et anglophones du continent

J’ai tout de suite vu le potentiel de cette dynamique sud-sud impulsée par la PEFOP. Permettre aux pays africains de véritablement échanger et partager leurs bonnes pratiques en matière de formation professionnelle, cela n’existait pas. (…) La réussite de ce projet tient aussi au fait qu’il a su insuffler des solutions pérennes, réalistes en termes de qualité/prix, et complémentaires aux modèles promus par les partenaires européens.

Alexis Hoyaux
Expert en EFTP pour LuxDev, détaché à la Commission européenne

Ces nombreuses activités de mise en réseau de la PEFOP ont donné naissance à des pratiques et à des instruments particulièrement novateurs. C’est le cas notamment de la Plateforme de mutualisation  des ressources et des outils de la formation professionnelle. « Développée grâce à l’appui de la PEFOP, cette plateforme permet aux pays membres de l’UEMOA  et aux autres pays adhérents, comme le Tchad, de partager leurs ressources, référentiels et programmes de formation, pour les adapter à leur propre contexte », explique Amidou Bancé, Secrétaire permanent du Cadre de concertation des Ministres chargés de l’emploi et de la formation professionnelle de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Depuis son lancement, plus de 325 ressources nationales de formation ont déjà été partagées et ouvertes à la mutualisation.

25
publications ont émané du projet PEFOP, dont cinq études à portée continentale.

Les connaissances sont aussi essentielles dans ces activités de partage qui permettent aux acteurs de se renforcer mutuellement. Ainsi la PEFOP a conçu et publié , avec l’aide d’experts continentaux et internationaux, des études sur les thématiques les plus pertinentes pour la rénovation des systèmes de formation professionnelle en Afrique.

Atelier Pefop

Retrouvez toutes les publications de la PEFOP

La PEFOP, c’est aussi un portail web très riche et actif, qui continuera à informer les acteurs africains de l’EFTP des dernières actualités du sous-secteur et à partager les publications clés de l’IIPE-UNESCO et de ses partenaires.

Trois projets innovants sur les rails

L’innovation en EFTP a eu la part belle au sein de la PEFOP. Suite à un appel à propositions lancé en 2017, trois projets ont été sélectionnés au Burkina Faso, au Cameroun et au Sénégal pour bénéficier d’un appui technique et financier. Si ces trois expérimentations s’inscrivent dans des contextes très différents, elles répondent à un même défi : repenser la formation professionnelle à travers le prisme des territoires, pour répondre aux besoins spécifiques des économies locales et des réalités de terrain. Ou, autrement dit, accompagner la décentralisation des dispositifs d’EFTP en y intégrant des mécanismes de concertation avec les acteurs locaux.

Parmi les projets sélectionnés figure celui de l’ONG CREDO, qui forme et place des jeunes défavorisés dans des entreprises au Burkina Faso. Découvrez en images l’impact de la PEFOP sur ses activités en matière d’EFTP. 

Gros plan sur les expériences de la FEREFAN au Cameroun et de la SODEFITEX au Sénégal

 

SODEFITEX

La PEFOP a également apporté un soutien technique et financier à la Fédération des écoles familiales agricoles du Grand Nord du Cameroun (FEREFAN). Depuis plus de quinze ans, cette Fédération propose une offre de formation alternative et informelle aux jeunes, pour répondre aux réalités de cette région rurale en proie à la pauvreté et aux violences armées – et où l’offre scolaire est peu développée, en particulier pour les filles et les femmes. L’appui de l’IIPE-UNESCO, à travers la PEFOP, a notamment permis de formaliser la formation « Producteur rural », avec la création d’un référentiel de compétences, des livrets de formation pour les productions végétales et animales, ou encore des fiches pratiques. Depuis, les demandes de formation ont augmenté par rapport aux années précédentes - tout comme l’intérêt national pour cette démarche innovante.

Cette expérience avec la PEFOP nous a permis non seulement de structurer notre offre de formation mais aussi de gagner en visibilité institutionnelle et d’inspirer d’autres régions agri-écologiques du pays, qui souhaitent aujourd’hui décliner et adapter le dispositif.

Parfait Djoryang Dtissébè
Secrétaire exécutif et coordinateur pédagogique de la FEREFAN

Pour la Fédération, la prochaine étape consiste à inscrire officiellement ses formations alternatives dans le dispositif national d’EFTP du Cameroun, dès que les modalités d’homologation seront établies, le cadre national de certification étant actuellement en développement.

Le troisième projet innovant lauréat émane d’un acteur privé, la Société de Développement et des Fibres textiles (SODEFITEX) au Sénégal. Il vise à faire reconnaître certaines de ses formations professionnelles en langues locales (d’abord le Pulaar puis à terme le Mandingue et le Wolof), à travers la mise en place d’une certification nationale.

En savoir plus sur la collaboration entre l’IIPE-UNESCO Dakar et la SODEFITEX dans le cadre de la PEFOP.

PGEFTP : une formation inédite en Afrique

Lancée en octobre 2020, en pleine pandémie, la formation Pilotage et gestion de l’EFTP de l’IIPE-UNESCO Dakar est un autre aboutissement majeur du projet PEFOP. Deux cohortes ont déjà été formées, soit environ 80 personnes au total issues de toute l’Afrique, et l’IIPE-UNESCO envisage, outre la préparation de futures promotions francophones, d’offrir également la formation du PGEFTP en langue anglaise à terme.  

À Madagascar, Holimalala Angela Ratovobarimanana fait partie des toute premières personnes francophones certifiées PGEFTP.

J’ai beaucoup appris sur l’environnement général de l’EFTP, notamment grâce au partage d’expériences avec les autres pays participants. Les contenus de la formation font directement écho aux missions de mon poste et à mes problématiques quotidiennes. Actuellement membre du Comité technique interministériel de mise à jour du Modèle de simulation Financière et Économique du Plan sectoriel de l'éducation de Madagascar, j’applique les connaissances acquises durant la formation PGEFTP.

Holimalala Angela Ratovobarimanana
Cheffe du service Production des ressources pédagogiques au Ministère de l'Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle de Madagascar

Gouvernance « multi-acteurs » et « multi-niveaux », reconnaissance des parcours de formation non-formels, pilotage par la demande économique… ces sept dernières années, la PEFOP est parvenue à poser les jalons d’un nouveau paradigme de la gestion de l’EFTP en Afrique. En droite ligne avec sa 11e stratégie à moyen terme, l’IIPE-UNESCO Dakar est déterminé à poursuivre ses efforts en faveur de l’emploi des jeunes et de la croissance sur le continent, aux côtés de ses partenaires financiers.