Polemag #32 Interview : Amidou Bancé

Dans notre dernière édition du magazine d'actualité de l'IIPE-UNESCO Dakar, Polemag #32, qui se consacre au Développemeent des compétences, découvrez l'Interview de Amidou Bancé, Secrétaire permanent du cadre de concertation des ministres en charge de l'emploi et de la formation professionnelle de l'espace UEMOA (CCMEFP-UEMOA).

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Formation professionnelle CNQP
©Sylvain Cherkaoui
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Formation professionnelle CNQP
©Sylvain Cherkaoui

1) L’IIPE-UNESCO Dakar soutient depuis 2017 le CCMEFP-UEMOA pour le développement et l’animation d’une Plateforme de mutualisation des outils et ressources de la formation professionnelle. De quoi s’agit-il ?

La Plateforme de mutualisation des outils de la formation professionnelle des pays de l’UEMOA et du Tchad est née d’un constat. Plusieurs partenaires des politiques d’EFTP en Afrique observaient des besoins similaires entre pays de la région pour le développement des outils de formation.

C’est de là qu’est venue l’idée : une mutualisation structurée et dynamique des outils et ressources de la formation professionnelle entre pays de l’UEMOA constitue un enjeu stratégique fondamental pour renforcer les dispositifs nationaux de formation afin de mieux répondre aux besoins et priorités économiques des pays membres. Dès l’origine, l’IIPE a été un partenaire clé pour le financement et le développement technique de l’outil.

Le principe est simple. Les pays de la zone UEMOA et le Tchad se sont engagés dans le cadre d’un protocole d’entente à partager leurs outils et ressources de la formation professionnelle, en particulier les documents permettant le développement d’une formation. Par exemple, un référentiel métier-compétences de menuisier-aluminium ou un guide d’évaluation de fermier agricole.

Dans la pratique, il revient à chacun des pays d’alimenter la plateforme en ressources et de traiter les demandes de ressources sur la plateforme. Les demandeurs de ressources peuvent être les ministères en charge de l’EFTP, les centres de formation publics ou privés, les ONG, les projets et programmes de formation technique et professionnelle.

Le portail numérique de la plateforme de mutualisation est géré par une unité d’administration qui relève du Secrétariat permanent du Cadre de concertation des ministres. L’unité d’administration du portail numérique est responsable des aspects techniques du portail numérique et, à ce titre, assure notamment le développement technologique, la maintenance du système, la mise en ligne et la mise à jour des données et toutes autres activités nécessaires au bon fonctionnement du portail.

Le rôle du CCMEFP est donc celui de facilitateur. Il veille également à ce que les délais de traitement des demandes de ressources soient respectés. 

2) Quel bilan faites-vous de ces cinq premières années de fonctionnement de la plateforme ?

La plateforme confère un véritable gain de temps et d’argent pour les pays. Pour développer une nouvelle formation, quatre documents sont généralement nécessaires : un référentiel métier-compétences, 
un référentiel de formation, un référentiel d’évaluation, et un guide d’organisation matérielle et pédagogique.Le coût moyen pour le développement de ces documents de référence est d’environ six millions
de FCFA.

En adaptant la ressource à partir de documents déjà existants dans un autre pays, le coût de revient est d’environ deux millions de FCFA. Soit un coût de développement divisé par trois. Selon les estimations faites dans les pays, cette méthode offre également un gain de temps considérable. Elle permettrait de réduire le temps de développement de l’ordre de 60 % pour une nouvelle ressource de formation.

En 2017, 2 110 ressources ont été recensées dans les huit pays de l’UEMOA. À ce jour, 545 ressources ont été partagées sur la plateforme, 259 ressources ont été demandées et 112 ressources ont été transférées. On observe donc une vraie dynamique de partage et d’appropriation de la plateforme par les acteurs de la formation professionnelle de l’espace UEMOA...

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Amidou Bancé

3) Dans quelle mesure la dynamique régionale de mutualisation vous semble-t-elle impacter les capacités nationales à gérer et développer les ressources de la formation professionnelle ?

Le fonctionnement de la plateforme de mutualisation repose, d’une part, sur une unité régionale d’animation composée du CCMEFP-UEMOA, de l’IIPE-UNESCO Dakar et de personnes-ressources, et, d’autre part, d’équipes nationales dans les ministères en charge de la formation professionnelle de chacun des pays : les entités nationales de mutualisation (ENM).

Avec la plateforme, les ENM ont développé des compétences nouvelles. Elles recensent les ressources mutualisables au niveau national, puis les partagent sur la plateforme de mutualisation. Les ENM gèrent également les demandes de ressources émanant de la plateforme, en acceptant ou refusant le partage d’une ressource conformément au protocole d’entente de la mutualisation signé en 2017.

La plateforme régionale de mutualisation n’est utilisée que pour des demandes émanant d’un autre pays. Chaque ENM doit de son côté mutualiser dans son propre pays. Les capacités développées grâce à la plateforme régionale ont donc pour effet de faciliter la mise en relation entre demandeurs et entités, pour une ressource de formation au niveau pays. La plateforme régionale de mutualisation contribue ainsi à renforcer le dispositif national de formation et à diversifier les filières de formation.


4) L’UEMOA a lancé cette année, avec l’appui de la coopération suisse, un vaste Programme régional pour la formation professionnelle (PROFOR) en Afrique de l’Ouest et au Tchad. Le CCMEFP est en charge de la mise en œuvre d’une partie des activités programmées. Quels chantiers le CCMEFP prévoit-il de développer dans le cadre de ce programme ? 

Le nouveau Programme régional pour la formation professionnelle (PROFOR) est né de la mutualisation. Voyant la dynamique de partage régional des ressources de la formation professionnelle opérer, la coopération suisse a décidé d’appuyer le développement des entités nationales de mutualisation.

L’un des enjeux du PROFOR est de créer des plateformes nationales pour gérer les outils et ressources de la formation professionnelle au niveau de chaque pays. Ces dispositifs nationaux seront arrimés à la plateforme régionale de mutualisation pour renforcer l’ensemble de l’architecture. Un diagnostic institutionnel et opérationnel des ENM est prévu pour établir un plan d’action de renforcement de la mutualisation.

Le PROFOR va également ouvrir le chantier d’un cadre régional de certification des métiers. Il est prévu d’identifier 24 métiers prioritaires porteurs de croissance et de développer l’ensemble des outils de formation pour ces métiers dans les pays de la zone UEMOA. Au total, c’est une centaine de documents de formation qui seront mis à disposition et seront partagés sur la Plateforme.

D’autres initiatives sont prévues dans le cadre du PROFOR, comme l’adoption d’un cadre régional de validation des acquis de l’expérience ou le développement d’une méthodologie de formation des formateurs avec le RAFPRO.

L’IIPE va intervenir de façon technique sur l’ensemble des activités de l’Axe 1 de ce programme d’envergure régional pour le renforcement de l’employabilité de la jeunesse, le développement des compétences techniques et professionnelles des jeunes en lien avec les besoins du marché de travail et la mobilité professionnelle dans la zone UEMOA.