Au Liberia, mettre l'apprentissage en marche grâce à la nouvelle analyse du secteur de l'éducation

Le gouvernement du Libéria vient de finaliser, avec l’appui de l’IIPE-UNESCO Dakar, une analyse de son secteur de l’éducation. Réalisé lors de la pandémie mondiale de COVID-19, l’analyse a été l’occasion de mettre en lumière les forces et faiblesses du système éducatif. Retour sur les principales conclusions.

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La population du Liberia a été estimée à plus de 5 millions de personnes en 2020 et les prévisions annoncent une croissance à 6,4 millions d'ici 2030. 40 % de la population en 2020 était âgée de moins de 15 ans, ce qui contribue à une pression croissante sur le système éducatif.  Le secteur devrait accueillir 483 000 enfants et jeunes de plus d'ici 2030.

Comme dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire, le système éducatif libérien est confronté à plusieurs défis liés à la qualité de l'éducation, notamment une offre insuffisante de matériel d'enseignement, et une forte proportion d'enseignants non qualifiés, ce qui se traduit par de faibles résultats d'apprentissage.

Au Libéria, les ratios élèves/manuels à l'école primaire sont élevés ; dans les écoles publiques, un minimum de six apprenants se partage en moyenne un seul manuel de langue. Cette pénurie est également observée au niveau secondaire, où sept élèves du secondaire inférieur se partagent un manuel de langue et la situation y est encore pire en mathématiques avec huit élèves pour un manuel.

L’analyse du secteur de l’éducation du Libéria met en lumière les avancées et les défis du secteur, jetant les bases du développement du nouveau plan sectoriel du pays pour atteindre les principaux objectifs d'éducation sur la voie de l'Éducation 2030.

Faibles dépenses en matière d'éducation

Les dépenses publiques consacrées à l'éducation restent faibles au Liberia, ce qui remet en question la possibilité d'atteindre les objectifs du pays en matière d'éducation. En 2020/2021, les dépenses d'éducation représentaient 13,8 % des dépenses globales, soit 2,6 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui est en deçà des recommandations, à savoir 20 % des dépenses nationales (ou 4 à 6 % du PIB) pour les pays poursuivant l'ODD4.

Si l'on considère les dépenses par sous-secteur, on constate que l'enseignement supérieur reçoit la plus grande part. Les dépenses à ce niveau sont presque cinq fois plus élevées que celles de l'enseignement de base et secondaire. Comparativement, le Liberia est le troisième pays de la CEDEAO à dépenser le moins par apprenant, soit environ 8,3 % du PIB par habitant dans le primaire et 20,7 % dans le secondaire.

Le système éducatif doit disposer d'enseignants de qualité qui dispensent un enseignement de qualité aux enfants scolarisés. Cela signifie que nous devons être en mesure d'assurer les salaires de ces enseignants. Nous avons besoin de matériel d'enseignement. Nous avons besoin d'installations scolaires attrayantes pour les étudiants afin de faciliter l'apprentissage. Le financement est le seul moyen d'y parvenir.

Dominic Dormenla Nanda Kweme
Ministre adjoint de l'Éducation pour la planification, la recherche et le développement, ministère de l'éducation, Liberia

Un taux de scolarisation élevé au préscolaire mais des pratiques d'apprentissage perfectibles

Le Liberia a l'un des taux de scolarisation préscolaire les plus élevés de la région. Cette couverture élevée est toutefois due à la forte proportion d'enfants âgés, ce qui a des répercussions sur le reste du système éducatif. « Pour chaque cycle, 80 à 85 % des élèves actuellement inscrits à l'école ont un âge plus élevé que leur classe d’âge, » indique Dominic Kweme

Malgré l'existence d'un programme national mettant l'accent sur l'apprentissage par le jeu, ces compétences ne sont pas observées en classe. Peu de matériel ou de support d'apprentissage par le jeu est présent dans les classes, les matériaux les plus fréquemment utilisés étant le tableau noir et la craie. Dans certains cas, les enseignants continueraient à utiliser des méthodes de discipline physique ou verbale négatives en classe.

Des disparités dans l'éducation de base

Les données de l'enquête démographique et de santé 2019/20 montrent des niveaux d'accès égaux pour les apprenants masculins et féminins en première année du primaire ; cependant, l'écart se creuse entre les sexes avec l'ascension des classes. La plus grande différence d'accès est observée entre les quintiles de richesse, les enfants issus des familles les plus pauvres ayant 21 % de chances en moins d'accéder à la première année que ceux issus des milieux les plus riches. Il en résulte une espérance de vie scolaire moyenne de 10,4 ans chez les plus riches - plus du double des 4,8 observés chez les plus pauvres.

"Le Liberia prend ses responsabilités et réforme l'évaluation afin d'identifier rapidement les faiblesses et d'y remédier pour garantir un apprentissage durable", a déclaré M. Polycarpe Otieno, analyste et planificateur de la politique de l'éducation, IIPE-UNESCO Dakar. 

Favoriser l’égalité de genre dans l’éducation

Dans les postes de direction des écoles, les femmes sont sous-représentées. Par exemple, bien qu'elles représentent 13 % du corps enseignant dans le premier cycle du secondaire, les femmes ne représentent que 4 % des directeurs d'école. Cette prédominance se retrouve également dans l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes, où les femmes reçoivent des salaires inférieurs de 6 % et de 11 % à ceux de leurs homologues masculins, respectivement pour le personnel enseignant et non enseignant. Pour attirer et retenir un personnel féminin motivé, il faudrait s'attaquer à l'écart de rémunération.